3. Ce peuple-là doit quelque part être encadré. Le travail revient aux formations politiques. Mais elles le font de moins en moins …
professeur kalele: C’est une faille. Mais je crois que le plus grand problème est qu’il faut une direction politique – parce que la liberté s’arrache soit par la voie armée, soit non armée – suppose que les chefs ou leaders du mouvement prêchent eux-mêmes par l’exemple. Ce sont des risques qu’il faut prendre et qui peuvent conduire jusqu’au sacrifice suprême.
Ce qui nous manque réellement aujourd’hui, c’est ce genre de courage.
Les gens peuvent parler, mais ils mettent des gants. Alors qu’il faut prendre des risques dans une manifestation, affronter la police et l’armée et prendre le devant dans une guerre, etc. Nous sommes tombés aujourd’hui dans la civilisation du plaisir, du sexe, de la boisson et de la musique. Il y a un très grand déséquilibre moral. Donc, ce ne sont pas ces leaders efféminés qui peuvent conduire un mouvement révolutionnaire.
4. Faut-il attendre cet homme providentiel ?
professeur Kalele: Dans les années 20, nous avons eu Simon Kimbangu. Quel niveau d’instruction avait-il? Il n’était même pas chaussé. C’est plus tard, quarante ans après que surgit Lumumba, semi-lettré. Après lui, Laurent-Désiré Kabila est venu. Je crois qu’après Laurent-Désiré Kabila, nous aurons quelqu’un d’autre.
5. Revenons au néo-colonialisme auquel nous faisons face. Y a-t-il une relation entre ce qui se passe dans la partie Est de la RDC et le néo-colonialisme ?
Professeur kalele: C’est fondamentalement du néo-colonialisme. Nous avons déjà eu à démontrer à plusieurs reprises que la guerre de l’Est est une guerre économique. Les rapports des experts de l’Onu sur le pillage des ressources naturelles du Congo l’ont réaffirmé.
Tous les rapports qui ont suivi font exactement ce constat selon lequel les multinationales et les Occidentaux, à la recherche des matières premières dont le coltan, avaient décidé de faire cette guerre. Ils ont cherché les acteurs et ont pris le Rwanda et l’Ouganda comme mercenaires.
Ils ont monté les Banyamulenge contre les autres tribus du Kivu. En janvier 2009, M. Sarkozy a même demandé que nous acceptions de partager les richesses avec les voisins.
Mais le travail est confié aux multinationales qui pillent nos ressources. La guerre devient alors du business. La Monuc, présente pour instaurer la paix, ne fait que compter le nombre de civils tués. Par ailleurs, les décisions viennent de l’extérieur. Et plus grave, maintenant, avec la complicité des nationaux civils et militaires.
6. Quel commentaire faites-vous du mandat de la Monuc qui a été prorogé de cinq mois ?
professeur kalele: Sans nous consulter, on a établit pour que la Mission onusienne reste pendant cinq mois. Après le 30 mai, ce mandat va encore être prorogé de 12 mois. Pourquoi ne nous consulte-t-on pas ? Nous revenons au néo-colonialisme. Sans avoir restauré la paix, on augmente le nombre des effectifs, sans nous consulter.
7. Pour vous, cela ne sert à rien … ?
Professeur kalele: C’est pour dire que nous devons nous réorganiser sérieusement, nous réarmer pour arracher une deuxième fois l’indépendance qui soit la vraie. Le budget vous est imposé. On vous interdit même d’augmenter les salaires. Alors quel type d’indépendance avez-vous ? Je ne sais pas ce qu’on va fêter le 30 juin 2010. Il faut commémorer le cinquantième anniversaire de la perte de l’indépendance. Les réalités sont là …
8. C’est une grande fête ? On a décrété l’année jubilaire. Les Congolais sont fiers du 30 juin ?
Professeur Kalele: Je veux bien. Mais cette indépendance est vide. Déjà en 1961, On a tué cette indépendance par la liquidation de ses ténors, les sécessions, la désorganisation, la reconquête économique du territoire, le placement des dirigeants, la liquidation systématique de tous ceux qui tentaient s’affirmer autrement.
Ne faisons pas de la comédie. L’indépendance est à reconquérir. Vous parler de Mulele avec la deuxième indépendance. Un livre a été présenté par la journaliste belge, Colette Braeckman, c’est titré : «La deuxième indépendance du Congo». Le problème est très sérieux .